Déchets plastique illégaux : l’occident poussé dans ses retranchements (vu dans Le Marin du 31 Mai 2021)

Publié le 28/05/2021 12:30 | Mis à jour le 31/05/2021 09:02

Trois millions d’euros, c’est l’amende qu’a dû payer Hapag-Lloyd pour avoir tenté d’importer 25 conteneurs de déchets non déclarés au Sénégal. Une affaire qui rappelle que l’exportation illégale des déchets plastique est une pratique encore bien courante.

Le 17 mai, le porte-conteneurs Hansa Neuburg, battant pavillon libérien, a tenté de faire passer illégalement 25 conteneurs totalisant 581 tonnes de déchets plastique sur le territoire sénégalais, avant de se faire arrêter par la douane de Dakar. Un évènement survenu alors même que le pays vient d’adopter une loi interdisant la production de certains plastiques à usage unique au sein de ses frontières.

Au bout de six jours, l’armateur du navire, l’allemand Hapag-Lloyd, a préféré payer l’amende d’environ 3 millions d’euros (2 milliards de francs CFA) en échange d’une levée d’immobilisation du navire et prenant à ses frais la réexportation des déchets plastique. Contacté par le marin, Hapag-Llyod n’a pas souhaité commenter cette décision. Les conteneurs, en provenance d’Espagne selon RFI, ont alors repris le large en direction de la Mauritanie.

8 millions de tonnes

La quantité de plastique déversée dans les océans tous les ans (sur 300 millions de tonnes produites chaque année, selon WWF). Les déchets non traités sont entassés dans des décharges sauvages qui finissent souvent dans les mers par voies fluviales.

Conteneur

Au mois d’avril, les douanes françaises ont empêché l’exportation illégale de plus de 400 tonnes de déchets au départ du Havre, Marseille, Bordeaux et La Réunion. Le conteneur est le premier vecteur de transport des marchandises illégales.

Selon un rapport d’Interpol, le trafic des déchets illégaux a considérablement augmenté ces dernières années, passant de 10 millions de tonnes par an avant 2010 à presque 360 millions de tonnes en 2018. Pour faire passer les déchets illégalement, les organisations criminelles ont recours à plusieurs subterfuges tels que l’usage de faux documents déclarant les déchets plastique comme des matières premières. D’autres sont simplement cachés parmi les conteneurs autorisés à l’export. C’est évidemment impossible pour les douaniers de vérifier chaque conteneur un à un. 

Depuis le 1er janvier, la Chine a officiellement fermé ses portes aux bateaux important des déchets plastique. Une décision initiée en 2017 face aux productions considérables de plastique par le pays, désireux de ne pas devenir la poubelle des pays occidentaux.

De nouvelles routes vers l’Afrique

Les pays d’Europe et d’Amérique du Nord se sont alors dirigés vers l’Asie de l’est, qui tente de lutter à son tour contre les dérives. En novembre 2019, la Malaisie a renvoyé à leurs expéditeurs 450 tonnes de déchets plastique contaminés, provenant majoritairement de pays développés. Dont 43 conteneurs de déchets illégaux français retournés au port du Havre, accompagnés d’une amende administrative de 192 000 euros.

Face à une Asie réticente, l’Afrique est la nouvelle cible des pays occidentaux, qui préfèrent sous-traiter que recycler dans leur propre pays alors même que le continent n’a pas toujours les infrastructures nécessaires pour recycler ses propres déchets plastique. C’est le cas du Kenya, pourtant en négociation avec les États-Unis pour un « plastic deal », accord commercial bilatéral.

Si le trafic des déchets dangereux est réglementé par la convention de Bâle depuis 1989, aucune solution viable n’a été mise en place concernant les déchets plastique, pourtant polluants et toxiques pour le monde maritime. Le rapport d’Interpol souligne particulièrement le manque de traçabilité et de standardisation des licences de gestion des déchets plastique à l’échelle mondiale. La seule solution reste donc la diminution drastique de la production plastique. 

Selon Greenpeace, plusieurs ministres de la protection de l’environnement de la Communauté économique des États de l’Afrique de l’ouest (Ecowas en anglais) auraient cependant accepté d’interdire l’exportation, l’importation et la commercialisation d’emballages plastique d’ici à 2025. 

Laurie MUSSET

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