comparaison Le Pen Macron: un programme pour la Guyane

Attention on « n’essaie » pas, on ne revient plus en arrière……

Macron-Le Pen : leurs projets et la Guyane

À moins de quatre jours du second tour de l’élection présidentielle, Guyaweb revient sur les programmes d’Emmanuel Macron et de Marine Le Pen. Éloignées sur plusieurs aspects, les promesses se rejoignent sur le « désenclavement » des communes de l’intérieur, la révision de l’octroi de mer et le durcissement des conditions de vie à l’encontre des migrant·es. 

Éducation

Sur cet enjeu primordial, les deux candidats disent vouloir augmenter le salaire des enseignant·es. Mais pour Emmanuel Macron, en contrepartie de nouvelles missions comme l’aide au devoir ou l’accompagnement sur le temps périscolaire. Sans condition et à hauteur de 3% du salaire supplémentaire par an, promet Marine Le Pen.

En matière d’enseignement, le président sortant entend augmenter les heures de français et de mathématiques en primaire et en 6e, revenir sur la décriée réforme Blanquer en réintroduisant les mathématiques dans le tronc commun au lycée, réformer la voie professionnelle, promouvoir l’apprentissage et créer un lycée maritime en Guyane pour soutenir la filière pêche. Le candidat promet également l’amplification de la lutte contre l’illettrisme et la déscolarisation dans notre département, ce qu’il n’a pas réussi à infléchir au cours de son mandat.

Dans son « programme pour l’école », la candidate nationaliste veut avant tout revenir sur la réforme du bac et transformer le brevet en examen d’orientation. Marine Le Pen, qui est « contre le multiculturalisme » et veut « l’assimilation », annonce un « plan d’urgence éducative » en particulier pour la Guyane et Mayotte. Ce plan viserait à réduire les effectifs par classe en primaire, à construire de nouvelles écoles, à instaurer des cours de français obligatoires et gratuits pour les parent·es d’élèves allophones et à recruter davantage d’enseignant·es du premier degré par le biais de concours locaux.

Interrogés par Guyaweb, les représentants de l’extrême droite en Guyane indiquent que tou·tes les élèves de nationalité étrangère, de la maternelle au supérieur, seraient « expulsés » et n’auraient tout bonnement « pas accès à l’école ».

Social 

La question sociale, de l’accès aux droits et de la conquête du pouvoir politique par l’extrême droite doit se lire en Guyane à l’aune d’une réalité : 36 % des personnes recensées en 2017, dont les mineur·es, n’avaient pas la nationalité française. Le président de la Collectivité territoriale de Guyane, Gabriel Serville, dans un courrier adressé samedi à Marine Le Pen, s’inquiète d’ailleurs des « véritables troubles » que ne manquerait pas de lever dans la population guyanaise un exécutif d’extrême droite.

Priorité de campagne de la candidate Le Pen – cernée par les affaires financières : le coup de rabot à porter aux prestations sociales. En appliquant sa « préférence nationale », qui déroge à l’article 1er de la Déclaration des droits de l’homme invoquant l’égalité sans distinction, Marine Le Pen veut exclure des aides sociales ceux qui en sont bénéficiaires mais étrangers. Elle prétend ainsi économiser plus de 15 milliards d’euros par an. Mais cette proposition contrevient au principe d’égalité inscrit dans la Constitution et nécessiterait une révision de cette dernière. Selon le RN, réduire les aides sociales réduirait l’attrait de la France pour les étrangers. Cette « préférence nationale », cœur du programme de l’extrême droite, ne s’appliquerait pas seulement aux aides sociales, mais à l’ensemble du quotidien des minorités : emplois, logements sociaux, réservés en priorité aux Français·es.

Plusieurs mesures ont été annoncées par Emmanuel Macron sur le social et l’insertion professionnelle mais une a principalement retenu l’attention : celle de lier le versement du RSA (près de 24 000 bénéficiaires en Guyane) à une activité d’insertion. Le revenu de solidarité active serait ainsi conditionné au fait de réaliser 15 à 20 heures d’activité par semaine. Une mesure qui nécessite d’être « nuancée » dixit Georges Patient, représentant de campagne de Macron. Selon le sénateur, les bénéficiaires qui refuseraient une activité de formation ne verraient pas leur RSA purement supprimé. Dans tous les cas, ce n’est pas la première tentative d’Emmanuel Macron de toucher aux prestations sociales. En 2017, le chef de l’État avait tenté de démonétiser et conditionner le versement du RSA « à l’installation en séjour régulier sur le territoire durant 15 années et non plus 5 années ». Deux propositions retoquées par le Conseil constitutionnel et le Conseil d’État.

Aménagement du territoire, services publics 

Le « désenclavement » de la Guyane est l’axe majeur défendu par le programme du candidat Macron. Pour Cayenne, il évoque le désengorgement de « l’accès routier » par le développement de transports en commun et le doublement du pont du Larivot, deux projets qui sont déjà lancés. A l’Ouest, il annonce la création de nouveaux débarcadères, d’un nouvel aérodrome à Saint-Laurent et veut voir sous le prochain mandat l’ouverture de la « route du fleuve » entre Maripasoula et Papaïchton. Là encore, les travaux ont déjà commencé. Sur le volet énergétique, Emmanuel Macron affirme que la mise en service de la centrale du Larivot se fera en 2025, « malgré les contentieux ». Idem pour l’usine à hydrogène de Mana. Ce programme n’est « pas figé » affirme Georges Patient, qui appelle les élu·es à être forces de propositions.

Le RN promet le développement des aménagements routiers, portuaires et du tissu industriel. Surtout, Le Pen dit vouloir redonner du « poids politique  » à l’Outre-mer avec la création d’un « grand ministère » d’État de l’Outre-mer et de la politique maritime qui aurait à rendre des comptes sur ses actions, tous les six mois.

Le débat télévisé de l’entre-deux-tours aura lieu ce mercredi 20 avril (à 16h en Guyane) en simultané sur TF1 et France 2. Capture d’écran du débat de l’entre-deux-tours en 2017.

Économie, emploi

Sur le plan économique, selon Georges Patient, Emmanuel Macron place en priorité l’industrialisation et la commercialisation accrues des ressources forestières et minières et voudrait « ouvrir » davantage les effets de l’activité spatiale aux Guyanais·es dans le cadre de la transition énergétique et du numérique en accentuant les partenariats sur la formation professionnelle et l’enseignement.

Sa concurrente annonce un « électrochoc économique » en Guyane avec, pour les Français·es uniquement, une exonération de l’impôt sur le revenu pour les moins de 30 ans, des défiscalisations et des exonérations de charges pour les créateurs d’entreprise de moins de 30 ans. « L’idée est de faire de la Guyane une zone franche » explique André Rougé, eurodéputé et porte-parole du RN en Outre-mer. Des incitations seraient mises en place et une agence pour les investissements en Outre-mer serait créée afin d’attirer les investisseurs. Un haut-commissaire à la coopération économique serait en outre nommé « pour faire rayonner l’économie guyanaise en Amérique du sud ». En parallèle, le RN dit vouloir accentuer les profits tirés de la mer et des sous-sols, en cassant la loi Hulot contre les forages pétroliers (visant à sortir des énergies fossiles) et par le lancement d’une « consultation » sur l’exploitation aurifère.

Vie chère, « pouvoir d’achat »

Pour s’attaquer aux causes de la vie chère, les deux candidats proposent la même chose : réformer l’octroi de mer.

Une option qui n’est pas vraiment une surprise puisque l’octroi de mer (qui pèse 35-60 M€ par an en Guyane) est très certainement appelé à ne plus être reconduit après 2027 puisque l’Europe n’en veut plus.

Macron souhaite le supprimer pour les produits de première nécessité. Le Pen veut également sa suppression, « sauf pour les produits entrant en concurrence avec ceux fabriqués en Guyane et les produits importés fabriqués hors Union européenne », précise André Rougé. Pour compenser la perte de recettes, la dotation globale de fonctionnement (DGF) serait augmentée d’après le programme du RN, qui souhaite également baisser la TVA sur les produits énergétiques et « venir à bout » du monopole de la Sara sur la distribution et le raffinage des carburants aux Antilles et en Guyane en ouvrant le marché local aux pays d’Amérique du sud producteurs de pétrole.

Autre point sur lequel les deux candidats s’accordent : développer le localisme. Emmanuel Macron souhaite plus de production endogène, notamment dans l’alimentaire. Le candidat LREM veut jouer sur la concurrence, promet plus de « rétrocession foncière » et la facilitation de l’installation des jeunes agriculteurs et agricultrices par le biais de la société d’aménagement foncier et d’établissement rural (Safer), réclamée de longue date et créée sous son mandat. En réponse à une forte attente populaire, Marine Le Pen dit vouloir également plus de « rétrocession foncière ».

Accueil des migrant·es, immigration clandestine

En Guyane, « le flux des nouveaux arrivants sur le territoire » (venant de l’Hexagone et de l’étranger) compense celui « des sortants » (composés principalement des jeunes diplômé·es).

Cela étant, sur la question du droit international de demander l’asile en France, Macron propose d’accentuer l’expulsion des personnes définitivement déboutées de leur demande. Le Pen veut que les demandes de droit d’asile soient faites en amont, dans le pays d’origine auprès des ambassades françaises, avant tout départ. Une immigration choisie comme la pratiquent déjà le Canada et l’Australie. La candidate s’oppose aussi fermement au regroupement familial.

De même, les deux prétendants à l’Élysée sont favorables à un durcissement de l’accès à la nationalité française : le président sortant veut le conditionner à la maîtrise de la langue française. Sa concurrente veut supprimer la possibilité de recours au droit du sol (lequel actuellement ne s’applique pas automatiquement) et supprimer l’acquisition automatique de la nationalité par le mariage. Elle compte aussi inscrire dans la Constitution les circonstances menant à la déchéance de nationalité. Marine Le Pen est également favorable à l’expulsion systématique des « clandestins » ainsi que des « mineurs sans papiers », faisant fi des obligations légales concernant la prise en charge des mineur·es. Quant à Emmanuel Macron, il a promis d’intensifier la lutte contre « l’immigration irrégulière » en Guyane avec la construction d’un centre de rétention administrative (CRA) à Saint-Laurent du Maroni et une accélération des reconduites à la frontière.

Sécurité 

Sur la sécurité, le président-candidat souhaite réaffirmer et réinvestir les frontières de la Guyane face « aux pillages des ressources aurifères et maritimes ». Cela passerait par un renforcement des moyens militaires aériens et serait permis grâce à la nouvelle sous-préfecture à Saint-Georges qui avait été annoncée en fin de mandat. À l’échelle du territoire national, 10 000 postes seraient créés dans les services de sécurité.

Marine Le Pen souhaite aussi la hausse des effectifs de police et de gendarmerie : 7 000 dans l’ensemble du pays, en plus de 3 000 postes de personnels administratifs. La candidate RN dire vouloir doubler le nombre de magistrat·es d’ici la fin du quinquennat pour que la justice « s’applique réellement » car selon André Rougé « ce n’est pas le cas actuellement, faute de moyens, et cela casse le moral des policiers et gendarmes, car la justice ne suit pas, notamment sur les petites peines qui ne sont plus effectuées en prison. » Un programme tout carcéral qui prévoit également l’expulsion systématique des étrangers dès lors qu’ils sont condamnés. Marine Le Pen promet une diplomatie plus ferme avec le Brésil et le Suriname sur cette question-là.

Question statutaire

LREM n’est pas fermée sur la question de l’autonomie de la Guyane. Georges Patient affirme que Macron est « ouvert » sur ce point. « Le dialogue se fait mais c’est un processus long qui nécessite un fort consensus de la population, une préhension de cette dernière pour que l’évolution statutaire se poursuive. »

Du côté du Rassemblement national, on botte pour l’instant en touche : « Avant de faire les plans de la prochaine maison, il faut d’abord éteindre l’incendie et répondre à l’urgence sociale, sécuritaire, migratoire, sanitaire et éducative », défend André Rougé.

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