LOCALTIS: Gouvernement Borne 2 : les nouveaux interlocuteurs des collectivités

Publié le 4 juillet 2022par La rédaction avec AFP
Organisation territoriale, élus et institutions

La nouvelle équipe gouvernementale au grand complet de l’après-législatives a enfin été dévoilée ce 4 juillet, après la reconduction d’Elisabeth Borne comme Première ministre chargée de la Planification écologique et énergétique la semaine dernière. Elle compte 16 ministres, 15 ministres délégués et 10 secrétaires d’État. Parmi les promus, Christophe Béchu, éphémère ministre délégué aux Collectivités territoriales, devient ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires à la place d’Amélie de Montchalin, battue aux législatives. Caroline Cayeux, maire de Beauvais et présidente de Villes de France, a été nommée quant à elle ministre déléguée aux collectivités territoriales. Les portefeuilles jusqu’alors non pourvus comme le Logement et la Ville et les Transports reviennent respectivement à Olivier Klein, président de l’Anru et maire de Clichy-sous-Bois (Seine-Saint-Denis) et à Clément Beaune, jusqu’alors chargé des questions européennes. On notera également la nomination d’une secrétaire d’Etat chargée de la ruralité.
remaniement

© Romain GAILLARD, REA/ Emmanuel Macron et Elisabeth borne

La moitié du gouvernement nommé ce 4 juillet, qui compte 42 membres dont Elisabeth Borne, est composé de ministres qui étaient déjà dans la première équipe nommée le 20 mai. Bruno Le Maire reste ainsi à l’Economie, Gérald Darmanin à l’Intérieur, Catherine Colonna aux Affaires étrangères, Eric Dupond-Moretti à la Justice. Pas de changement non plus pour Sébastien Lecornu (Armées), Olivier Dussopt (Travail, Plein emploi et Insertion), Pap Ndiaye (Education nationale et Jeunesse), Sylvie Retailleau (Enseignement supérieur et Recherche), Marc Fesneau (Agriculture et Souveraineté alimentaire), Agnès Pannier-Runacher (Transition énergétique), Rima Abdul-Malak (Culture), Stanislas Guerini (Transformation et Fonction publiques), Amélie Oudéa-Castéra (Sports et Jeux olympiques et paralympiques). Gabriel Attal conserve également le portefeuille de ministre délégué chargé des comptes publics. Et Isabelle Rome celui de ministre déléguée chargée de l’Egalité entre les femmes et les hommes, de la Diversité et de l’Egalité des chances. Charlotte Caubel reste aussi secrétaire d’Etat chargée de l’enfance auprès de la Première ministre.
Parmi les « anciens » ministres, cinq changent de poste : Olivier Véran, éphémère ministre des Relations avec le Parlement, garde le titre de ministre délégué au Renouveau démocratique et devient porte-parole du gouvernement. Il remplace à cette fonction Olivia Grégoire qui devient ministre déléguée chargée des PME, du Commerce, de l’Artisanat et du Tourisme. Franck Riester, qui était au Commerce extérieur, devient chargé des Relations avec le Parlement, un poste clef étant donné que le camp présidentiel n’a pas obtenu la majorité absolue aux législatives du 19 juin. Clément Beaune, qui était chargé des Affaires européennes, prend les Transports alors que la présidence française de l’UE s’est achevée le 30 juin. Christophe Béchu, éphémère ministre délégué aux Collectivités territoriales, est promu ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires, en remplacement d’Amélie de Montchalin, battue aux législatives.
A l’inverse Damien Abad, qui fait l’objet d’une enquête du parquet de Paris pour tentative de viols, quitte le gouvernement. Mais Chrysoula Zacharopoulou reste ministre déléguée chargée du Développement alors qu’elle s’était vu reprocher par des patientes des gestes assimilables selon elles à des « viols » quand elle exerçait comme gynécologue.
Une vingtaine de ministres sont novices à leurs postes, tels que l’ancien urgentiste François Braun à la Santé, le patron de la Croix-Rouge Jean-Christophe Combe aux Solidarités et Personnes handicapées ou encore Caroline Cayeux aux Collectivités territoriales et Carole Grandjean à l’Enseignement et la Formation professionnels.

Un tropisme « collectivités »

Le tropisme « collectivités » du gouvernement Borne II se trouve renforcé par l’arrivée de Caroline Cayeux au poste de ministre déléguée aux Collectivités territoriales, placée sous la double tutelle du ministre de l’Intérieur et des Outre-mer Gérald Darmanin et du ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires Christophe Béchu. Nul besoin de présenter Caroline Cayeux, maire divers droite de Beauvais et présidente de l’association Villes de France depuis 2014. A ce titre, elle a joué un rôle important dans le déploiement du programme de revitalisation des villes moyennes Action coeur de ville (ACV) reconduit après 2022, avant d’être nommée présidente de la toute nouvelle Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT) en décembre 2019, l’un des projets phares du premier mandat d’Emmanuel Macron.
Son penchant macroniste se manifeste lors des élections municipales de 2020, date à laquelle elle quitte Les Républicains et se fait réélire avec le soutien de La République en marche.
Fin 2021, elle avait ouvertement appelé à voter pour Emmanuel Macron. Lors de l’investiture de ce dernier le 7 mai dernier, elle figurait parmi les invités. Sa nomination intervient quelques jours à peine avant le congrès de Villes de France qui se tient les 11 et 12 juillet à Fontainebleau, dont le maire Frédéric Valletoux avait un temps été évoqué parmi les ministrables. Caroline Cayeux interviendra en triple qualité de présidente, de maire et de ministre… Son successeur à la tête de Villes de France devrait donc être désigné lors du congrès.

Christophe Béchu devient ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires. Maire d’Angers depuis 2014, il n’aura occupé que brièvement le poste de ministre délégué chargé des Collectivités territoriales sous la tutelle d’Amélie de Montchalin, qu’il remplace, après la défaite de celle-ci aux législatives. Il a promis lors de la passation de pouvoir à l’hôtel de Roquelaure « d’incarner l’écologie de l’action, résolue, ambitieuse, portée par des élus de terrain », soulignant que son équipe compte quatre maires. Christophe Béchu, qui aura en charge la protection de la nature, la lutte contre les inégalités territoriales ou encore la lutte contre l’étalement urbain, sera appuyé par deux ministres délégués aux Transports et à la Ville et Logement – Clément Beaune et Olivier Klein – et deux secrétaires d’Etat à l’Ecologie et à la Ruralité. En tant que maire, « je mesure les difficultés quotidiennes de concilier parfois ces injonctions contradictoires » pour mener la transition écologique, a-t-il encore assuré. Christophe Béchu, 48 ans, fait partie des maires de droite et du centre jugés Macron-compatibles : son nom avait déjà été évoqué pour la Cohésion des territoires lors du remaniement qui avait suivi le départ de Gérard Collomb, en octobre 2018.
« Je ne suis pas LREM, je suis divers droite, même si je me considère comme appartenant à la majorité présidentielle », affirmait en 2020 le maire d’Angers qui a quitté LR en décembre 2017, après l’arrivée de Laurent Wauquiez à la tête du parti. Ce dissident de LR, qui avait pris position pour Emmanuel Macron avant même la présidentielle, a plusieurs fois apporté son soutien au chef de l’Etat depuis, notamment via « La République des maires », une initiative pro-Macron lancée avec une trentaine d’élus en août dernier. Proche d’Edouard Philippe, il incarne aussi après la crise du coronavirus la modernisation institutionnelle prônée par Emmanuel Macron, pour qui « tout ne peut pas être tout le temps décidé de Paris ». Le chef de l’Etat l’avait déjà nommé il y a deux ans président de l’Agence de financement des infrastructures de France (Afitf).
Né le 11 juin 1974 à Angers, diplômé de Sciences-Po, Christophe Béchu a commencé sa carrière politique à 21 ans comme conseiller municipal de la commune d’Avrillé (Maine-et-Loire). Président du conseil général de ce département de 2004 à 2014, il a été élu maire d’Angers en 2014, après 37 ans de mandat socialiste, et a été largement réélu en 2020. Promoteur des mobilités douces, il se targue d’avoir fait de la cité angevine « la smart city (ville intelligente et connectée) la plus aboutie en France », avec ses vélos et trottinettes en libre-service. Il a aussi brièvement été député européen (2009-2011), puis sénateur du Maine-et-Loire (2011-2017).

Nommé ministre délégué à la Ville et au Logement,  un double portefeuille non pourvu dans le précédent gouvernement Borne, Olivier Klein, maire de Clichy-sous-Bois (Seine-Saint-Denis), l’une des villes les plus pauvres de France, fait entrer les quartiers populaires au gouvernement. Il a grandi dans le quartier du Chêne Pointu, décor des « Misérables » de Ladj Ly et souvent présenté comme l’une des copropriétés les plus dégradées de France. D’abord membre du Parti communiste, ce professeur d’histoire-géo a rejoint le PS en 2006. Après une quinzaine d’années dans le camp socialiste, Olivier Klein s’est rapproché puis a soutenu Emmanuel Macron.  « Il est très engagé dans sa ville », estime le président PS de la Seine-Saint-Denis Stéphane Troussel. « Il a contribué à la transformer, personne ne peut dire que cette ville n’a pas changé en 15 ans », souligne l’élu. « J’espère que dans les semaines, les mois, les années à venir, il saura ne pas oublier la Seine-Saint-Denis et défendre l’égalité territoriale parce qu’il y a du boulot ! », lance Stéphane Troussel. Olivier Klein était aussi à la tête de l’Agence nationale pour la rénovation urbaine (Anru) depuis fin 2017 et vice-président de la Métropole du Grand Paris, délégué à l’habitat et la mixité.

Autre portefeuille qui attendait un titulaire : les transports. Clément Beaune a été nommé ce lundi ministre délégué aux Transports, après avoir été le « Monsieur Europe » d’Emmanuel Macron, comme conseiller spécial puis secrétaire d’Etat. Il est diplômé du Collège d’Europe de Bruges, qui forme les élites européennes, et ancien élève de l’ENA. Issu de l’aile gauche de la Macronie, il s’est frotté en juin pour la première fois au suffrage universel, l’emportant d’un cheveu lors des législatives dans le centre de Paris. Il quitte les Affaires européennes quelques jours après la fin de la présidence française de l’UE, dont il a été une cheville ouvrière. Aux Transports, il restera toutefois confronté aux joutes européennes où se décident nombre de dossiers liés aux mobilités, notamment pour le financement des infrastructures. Clément Beaune devra également mettre en oeuvre les plans pour décarboner la route, l’aérien et le maritime, se pencher sur l’avenir des concessions autoroutières ou trouver des moyens pour moderniser le réseau ferré.

La députée de Gironde Bérangère Couillard a, elle, été nommée secrétaire d’État chargée de l’Ecologie auprès de Christophe Béchu. Elle a fait carrière dans la grande distribution, alimentaire et vestimentaire, avant d’intégrer l’Assemblée en 2017 sous les couleurs de LREM. Elle a été réélue pour un deuxième mandat en juin. Membre titulaire du Conseil supérieur de l’Energie elle avait aussi siégé à la Commission du développement durable sous la précédente mandature. Elle avait notamment été corapporteure de la loi d’Orientation des mobilités (LOM). Son entrée au gouvernement intervient alors qu’est attendu le 2e volet de la stratégie nationale biodiversité, et que se profile la COP15 biodiversité au niveau international en décembre.
 

Autre bonne nouvelle pour les collectivités : le retour d’un secrétariat d’Etat à la Ruralité, auprès du ministre de la Transition écologique et de la Cohésion des territoires Christophe Béchu. Le poste est dévolu à Dominique Faure qui succède à Joël Giraud après une parenthèse de deux mois, que les associations d’élus de la ruralité n’avaient pas manqué de dénoncer. Députée Renaissance nouvellement élue en Haute-Garonne, Dominique Faure, peu connue au niveau national, est issue du parti radical. En 2014, elle avait élue maire de Saint-Orens-de-Gameville, petite ville de 11.600 habitants de la banlieue toulousaine. Depuis 2020, elle est première vice-présidente de la métropole en charge de l’économie, de l’innovation et de l’emploi. Ingénieure de formation, diplômée de l’Insa de Lyon et d’HEC, son parcours professionnel l’a plutôt portée vers les télécommunications (Cegetel, SFR) et les ressources humaines (Altedia). Elle était ensuite devenue consultante dans la transformation digitale des grandes entreprises. Parmi les revendications des maires ruraux figure notamment le lancement d’un nouveau programme de revitalisation des villages, pris sur le modèle d’ACV ou de Petites villes de demain.

Hervé Berville devient, lui, secrétaire d’Etat à la Mer auprès de la Première ministre. Ce député LREM, réélu en juin, s’est engagé à l’Assemblée nationale sur les questions d’aide au développement et fut le « représentant personnel » d’Emmanuel Macron à Kigali en 2019 lors de la 25e commémoration du génocide au Rwanda, son pays de naissance. En orphelinat à Kigali avant le début du génocide, il a été évacué avec son frère aux premiers jours et adopté à l’âge de 4 ans par une famille de Pluduno (Côtes-d’Armor). Il n’est revenu qu’en 2015 au Rwanda, où une partie de sa famille d’origine, tutsie, a été décimée durant le conflit. Entre-temps, Hervé Berville, 32 ans aujourd’hui, est passé par Sciences-Po Lille, la London School of Economics, et a assuré des missions d’économiste pour l’Agence française de développement (AFD) au Mozambique. Un temps proche du PS, il rejoint à l’automne 2015 le collectif « Les Jeunes avec Macron », avant d’en devenir le référent Côtes-d’Armor pour la présidentielle. Elu au Palais Bourbon en 2017, parmi les cadets, il siège naturellement à la commission des Affaires étrangères. Hervé Berville a notamment adressé un rapport au Premier ministre sur la modernisation de l’aide au développement en 2018. Il a été l’année dernière le rapporteur d’un projet de loi de réforme de l’aide française au développement, avec des moyens renforcés et recentrés vers dix-huit pays africains et Haïti.

Quatre ministres délégués à Bercy

Une nouvelle équipe de ministres délégués entoure Bruno Le Maire en poste depuis… 2017 ! Ce pilier de la Macronie a en effet été reconduit, sans surprise, à son poste. C’est également le cas de Gabriel Attal maintenu au ministère délégué aux Comptes publics, déjà nommé dans le premier gouvernement Borne, après avoir été porte-parole du gouvernement de Jean Castex. Deux députés font leur entrée à Bercy : Roland Lescure et Jean-Noël Barrot, respectivement chargé de l’Industrie et de la Transition numérique et des Télécommunications. Ils sont rejoints par Olivia Grégoire qui fait son retour à Bercy après avoir été brièvement porte-parole du gouvernement Borne I. Tous trois ont en commun d’avoir travaillé au projet de loi Pacte (projet de loi relatif à la croissance et à la transformation des entreprises), texte phare de Bruno Le maire et du gouvernement d’Edouard Philippe. Réélu député des Français d’Amérique du Nord en mai dernier, Roland Lescure était président de la commission des Affaires économiques de l’Assemblée depuis 2017. Il avait été rapporteur général de la loi Pacte et a travaillé à ce titre à la privatisation d’Aéroports de Paris, projet entravé par une proposition de loi référendaire et l’irruption de la crise des gilets jaunes, marqueurs du premier quinquennat d’Emmanuel Macron. A cet égard, Roland Lescure s’était aussi fait remarquer en impulsant une mission parlementaire dont il a été le corapporteur, visant à évaluer le coût des dégâts causés par les manifestations de gilets jaunes. Briguant le perchoir de l’Assemblée, il s’était fait damer le pion par Yaël Braun-Pivet. Fervent porte-parole de La République en marche, le voilà récompensé à un poste stratégique, l’industrie – qui curieusement ne figurait plus dans le premier gouvernement Borne -, succédant ainsi à Agnès Pannier-Runacher. Il aura la responsabilité de la « réindustrialisation », important thème de campagne, avec la poursuite des Territoires d’industrie et la mise en œuvre du plan France 2030.

Autre récompense : celle du Modem Jean-Noël Barrot qui vient d’être officiellement nommé ministre délégué à la Transition numérique et aux Télécommunications. Réélu en juin avec 64,3% des suffrages face à une candidate Nupes, le député des Yvelines est un pur produit du centrisme, dans le sillage de son père, l’ancien ministre et commissaire européen Jacques Barrot. Peu connu du grand public, Jean-Noël Barrot, 39 ans, est spécialiste de questions budgétaires et secrétaire général du MoDem. En 2021, il avait sillonné la France pour les besoins du rapport « Accélérer le rebond économique des territoires » remis à Matignon sur la sortie de crise post-Covid dans les territoires en difficulté. Il y formulait 27 propositions pour accompagner les territoires fragiles dont un « Pack rebond » qui leur serait proposé en 2022 sous forme d’avenants aux contrats de relance et de transition écologique (lire notre article du 30 juin 2021). Il préconise par ailleurs « un « droit à la reconversion des territoires » à l’heure des grandes transitions, notamment écologiques » (‘lire notre article du 22 novembre 2021).
Diplômé de HEC, où il a ensuite enseigné, ainsi qu’au MIT à Boston, Jean-Noël Barrot s’était fait élire député des Yvelines en 2017 sous l’étiquette MoDem. Sa victoire aux législatives avait eu un goût de revanche pour celui qui, malgré un mandat de conseiller départemental, avait en partie échoué à s’implanter en Haute-Loire, dans le fief familial où son père et son grand-père furent députés. L’économiste a depuis pris ses marques dans le mouvement centriste de François Bayrou. A l’Assemblée, ce vice-président de la commission des Finances durant cinq ans est intervenu régulièrement sur l’évaluation des politiques publiques. A l’Assemblée, Jean-Noël Barrot, a notamment plaidé pour une réflexion sur le « revenu universel d’activité », pas celui défendu par l’ancien candidat socialiste à la présidentielle Benoît Hamon mais plutôt un socle qui viendrait fusionner les aides sociales existantes.

Enfin l’équipe de Bercy est étoffée par le retour d’Olivia Grégoire, éphémère porte-parole de Borne I, qui, après avoir été secrétaire d’Etat à l’ESS sous le gouvernement de Jean Castex, devient ministre déléguée chargée des Petites et moyennes entreprises, du Commerce, de l’Artisanat et du Tourisme, soit le contour du portefeuille de l’ancien secrétaire d’Etat Jean-Baptiste Lemoyne.
A noter qu’aucun secrétaire d’Etat ne figure désormais à Bercy. Ce remaniement marque aussi le retour de Marlène Schiappa au gouvernement, après avoir été évincée après la présidentielle. Un temps pressentie pour animer une émission de télé sur C8, elle sera secrétaire d’Etat chargée de l’ESS et de la Vie associative, mais placée directement sous l’autorité d’Elisabeth Borne.

Intérieur et Outre-mer

Gérald Darmanin est confirmé au ministère de l’Intérieur, malgré les remous de l’affaire du stade de France. Son premier chantier sera le vote de la Lopmi (projet de loi d’orientation et de programmation du ministère de l’Intérieur) présenté en conseil des ministres en mars dernier. Outre sa tutelle sur Caroline Cayeux, son portefeuille est élargi à l’Outre-mer. Il est épaulé dans cette fonction par Jean-François Carenco, ministre délégué chargé des Outre-mer. L’actuel président de la Commission de régulation de l’énergie remplace ainsi Yaël Braun-Pivet appelée au perchoir. Agé de 65 ans, Jean-François Carenco a connu une longue carrière dans la préfectorale, avant d’être nommé en 2015 préfet de la région Île-de-France, préfet de Paris, où il a contribué notamment au développement du Grand Paris. Sa connaissance de l’outre-mer remonte plutôt à sa première partie de carrière en tant que secrétaire général de la Nouvelle-Calédonie (1990), préfet de Saint-Pierre-et-Miquelon (1996), préfet de la Guadeloupe en (1999).

Egalement rattachéeauprès du ministère de l’Intérieur et des Outre-mer, Gérald Darmanin, la secrétaire d’État chargée de la CitoyennetéSonia Backès est la première politique issue de Nouvelle-Calédonie à entrer au gouvernement. Figure de la droite anti-indépendance locale, cette femme de 46 ans, engagée en politique depuis ses 18 ans est présidente de la province sud de cette collectivité française ; un mandat local qu’elle conservera même en tant que secrétaire d’État, comme elle l’a indiqué sur sa page Facebook en réaction à sa nomination, « parce que c’est à ces fonctions que les calédoniens m’ont fait confiance il y a 3 ans ». Elle succède à Marlène Schiappa qui devient secrétaire d’Etat chargée de l’Economie sociale et solidaire et de la vie associative.

Quai d’Orsay

Si Clément Beaune quitte les affaires européennes pour les transports, le gouvernement maintient sa ligne très eurocentrée. Il est remplacé par l’économiste Laurence Boone, secrétaire d’Etat chargée de l’Europe, placée sous l’autorité de la ministre de l’Europe et des Affaires étrangères Catherine Colonna (reconduite). Après un parcours dans de prestigieuses écoles (doctorat à la London Business School), elle a eu une carrière dans la banque et l’assurance. Elle connaît Emmanuel Macron de longue date, notamment pour lui avoir succédé à l’Élysée à l’été 2014 au poste de conseiller économique quand celui-ci fut nommé ministre de l’Économie. Et comme lui, elle a exercé dans des banques d’affaires, notamment chez Bank of America-Merryll Lynch, où elle a dirigé la recherche économique sur l’Europe. A l’Elysée, elle a notamment participé aux négociations sur l’Accord de Paris. Economiste en chef de l’OCDE depuis 2018, elle avait été promue secrétaire générale adjointe de l’organisation en janvier.
Annoncée sur le départ après deux plaintes pour viol déposées par des patientes de son cabinet de gynécologie, Chrysoula Zacharopoulou est maintenue au poste de secrétaire d’Etat chargée du Développement, de la Francophonie et des Partenariats internationaux.
L’équipe du Quai d’Orsay est complétée par le député du Haut-Rhin Olivier Becht, ministre délégué chargé du Commerce extérieur, de l’Attractivité et des Français de l’étranger. Réélu en juin sous l’étiquette Renaissance avec plus de 64% des voix, c’est un proche de Franck Riester à qui il succède.

Rue de Grenelle 

L’Elysée a annoncé lundi 4 juillet la création d’un poste de ministre chargé de l’Enseignement et de la Formation professionnels sous double tutelle, celle des ministres du Travail et de l’Insertion, Olivier Dussopt et de l’Education nationale et de la Jeunesse, Pap Ndiaye et c’est Carole Grandjean, députée LREM de Meurthe-et-Moselle, marconiste de la première heure qui en hérite. Emmanuel Macron a placé la formation professionnelle au centre de ses propositions pour les jeunes. Il veut notamment développer l’alternance dans les lycées et les licences professionnelles et rapprocher davantage l’école et les entreprises. Carole Grandjean devrait avoir en charge la réforme de la voie professionnelle, ainsi que les ajustements attendus sur les réformes de la formation professionnelle et de l’apprentissage (lire notre article du 4 mai 2022 et du 21 juillet 2021). « On est extrêmement inquiet du périmètre du poste de Carole Grandjean, car c’est la première fois que les lycées professionnels ne relèvent plus uniquement de l’Education nationale », a regretté auprès de l’AFP Sigrid Girardin, du syndicat enseignant Snuep-FSU. Âgée de 39 ans, fille de Denis Grandjean, ancien adjoint au maire de Nancy André Rossinot, jusqu’en 2014, ancienne responsable des ressources humaines – à la Caisse d’Épargne puis dans le groupe de restauration collective Elior – Carole Grandjean a été élue à l’Assemblée nationale en 2017. En tant que députée, Carole Grandjean faisait partie de la commission des Affaires sociales. Dans ce cadre, elle a mené en 2019, une évaluation de la fraude aux prestations sociales.

Sarah El Haïry retrouve quant à elle son secrétariat d’Etat à la Jeunesse « augmenté » du service national universel. Nommée très exactement « secrétaire d’État chargée de la Jeunesse et du Service national universel » dans le nouveau gouvernement d’Élisabeth Borne, la députée de Loire-Atlantique, était déjà secrétaire d’État chargée de la Jeunesse et de l’Engagement dans le gouvernement de Jean Castex de juillet 2020 à mai 2022 auprès du ministre de l’Éducation nationale. L’intitulé de son poste évolue toutefois légèrement : en charge notamment de l’Engagement lors du précédent quinquennat, elle est désormais directement responsable du Service national universel (SNU). Le dispositif, dont le déploiement a été freiné par la crise sanitaire, devrait toucher 50.000 jeunes volontaires en 2022 ( lire notre article du 7 février 2022) et pourrait devenir obligatoire à « l’horizon de 3-4 ans ».
Sarah El Haïry a par ailleurs participé au lancement du Service civique européen et a fait voter la loi sur le financement des associations en juillet 2021. Dans le gouvernement d’Élisabeth Borne, Sarah El Haïry est placée auprès du ministre des Armées et du ministre de l’Éducation nationale. Agée de 33 ans, titulaire d’une licence de droit obtenue à l’université de Nantes, Sarah El Haïry a exercé le métier de déléguée régionale à l’ESS avant de se lancer dans une carrière politique.

Santé : priorité aux urgences

Le médecin urgentiste François Braun a été nommé ministre de la Santé et de la Prévention en remplacement de Brigitte Bourguignon, battue aux élections législatives. Il avait été chargé en juin par Emmanuel Macron d’une « mission flash » sur les « soins non programmés », en pleine crise des urgences. Il a remis son rapport le 30 juin à Elisabeth Borne, qui en a retenu « toutes les propositions » et annoncé plusieurs mesures, dont une revalorisation du travail de nuit à l’hôpital. Chef des urgences du centre hospitalier régional (CHR) de Metz-Thionville et président de l’influente association Samu-Urgences de France, le Dr Braun sera donc chargé d’appliquer ses propres remèdes. Ex « référent santé » d’Emmanuel Macron durant la campagne présidentielle, il devra aussi préparer et conduire la « grande concertation » sur l’accès aux soins promise par le chef de l’Etat réélu.
 
A ses côtés, la députée de centre droit Agnès Firmin-Le Bodo (Horizons), proche d’Edouard Philippe et pharmacienne de profession a été nommée ministre déléguée à l’Organisation territoriale et aux Professions de santé. Elle a siégé durant les cinq dernières années à la commission des Affaires sociales de l’Assemblée et s’était investie sur le projet de loi de bioéthique et la PMA pour toutes, présidant la commission spéciale dédiée à ce texte. Elle est entrée au conseil municipal du Havre en 2001 et a occupé à partir de 2006 des postes d’ajointe auprès d’Antoine Rufenacht puis d’Edouard Philippe. Elle a aussi été première vice-présidente de la CODAH, la communauté d’agglomération havraise, avant d’être élue députée en 2017. Elle a alors succédé à Edouard Philippe comme députée de la 7e circonscription de Seine-Maritime et a été réélue en juin dernier.

« Ministère des vulnérabilités »

Le patron exécutif de la Croix-Rouge Jean-Christophe Combe a remplacé lundi Damien Abad au ministère des Solidarités. Avec l’universitaire Pap Ndiaye à l’Education nationale et l’urgentiste François Braun à la Santé, Jean-Christophe Combe est la troisième grande figure de la société civile au sein du gouvernement Borne II. Il a toutefois côtoyé de près plusieurs élus estampillés au centre et à droite, tout au long de son parcours professionnel.
« Je mesure d’ampleur de la tâche », a-t-il glissé lors de la passation de pouvoirs lundi à la mi-journée. « On est ici au ministère des vulnérabilités, je crois pour ma part que ces vulnérabilités sont une chance pour notre société ». « Rien ne pourra se faire sans s’appuyer sur les personnes concernées », a-t-il affirmé comme une promesse d’écoute et de dialogue avec tous les acteurs du secteur, après avoir listé les « défis à relever ». « Mieux concilier vie familiale et professionnelle, soutenir parents isolés, lutter contre la pauvreté des enfants, permettre aux personnes âgées de mieux vieillir et de rester le plus longtemps possible chez elles », a déclaré le nouveau ministre.
Âgé de 41 ans, Jean-Christophe Combe était directeur général de la Croix-Rouge française depuis 2016 après avoir occupé plusieurs postes stratégiques au sein de la grande association, mastodonte de l’humanitaire qui compte plus de 62.000 bénévoles et 17.000 salariés. Il y était entré en 2011 comme directeur de cabinet de son président Jean-François Mattei, ex-ministre de la Santé sous Jacques Chirac, après un parcours de collaborateur politique.
Titulaire d’une licence d’Histoire à Paris-IV-Sorbonne, ce natif de Sainte-Ménehould (Marne) a débuté sa carrière professionnelle en 2003 comme conseiller technique au nouveau groupe Union centriste (UC) au Sénat, un travail qu’il mène en parallèle avec des études à Sciences-Po Paris. A l’Assemblée nationale, il s’occupe des questions de finances, d’affaires étrangères, de défense et d’Union européenne. Diplôme de la rue Saint-Guillaume en poche, il part travailler pendant un an en 2006 au cabinet d’audit et de conseil Deloitte avant de revenir vers la politique, d’abord comme directeur du cabinet de Bruno Bourg-Broc, maire UMP de Châlons-en-Champagne de 2007 à 2009, puis du cabinet d’Emmanuel Lamy, maire UMP de Saint-Germain-en-Laye de 2009 à 2011.
Il entre dans l’équipe d’Elisabeth Borne à la 15e place de l’ordre protocolaire, quatre rangs de moins que son prédécesseur. Après un mois où l’actualité médiatique et judiciaire s’est invitée dans le quotidien du ministère des Solidarités, de l’Autonomie et des Personnes handicapées, les acteurs qui composent le périmètre de ce vaste portefeuille piaffent d’impatience.


La centriste Geneviève Darrieussecq a été nommée ministre déléguée chargée des Personnes handicapées après avoir assumé le portefeuille de la Mémoire et des Anciens combattants. Cette fidèle de François Bayrou est entrée en politique sur le tard après une carrière de médecin. Native des Landes, cette allergologue de 66 ans, profondément attachée à son Sud-Ouest, s’engage à l’UDF (rebaptisé MoDem en 2007) et devient conseillère régionale d’Aquitaine en 2004. Geneviève Darrieussecq conquiert ensuite successivement les échelons municipal, intercommunal, régional, départemental, avant de remporter en 2017 un siège de députée des Landes auquel elle est réélue aux dernières législatives. En 2008, elle conquiert la mairie de Mont-de-Marsan, à gauche depuis 46 ans. Les Montois la réélisent en 2014.  En 2017, elle est nommée secrétaire d’Etat aux Anciens combattants dans le gouvernement d’Edouard Philippe, puis promue ministre déléguée par Jean Castex. Pendant cinq ans, elle met en oeuvre la feuille de route mémorielle du président Macron : incitation des élus locaux à nommer des lieux publics avec les noms des combattants africains morts pour la France, gestion de dossiers sensibles liés à l’Algérie, comme la reconnaissance des Harkis – elle a notamment travaillé à l’adoption d’une loi de « reconnaissance » et de « réparation », promulguée le 23 février après avoir été annoncée par Emmanuel Macron en septembre 2021.

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