Les pays riches ont doublé leurs aides aux énergies fossiles en 2021, article de Joel Cossardeaux dans les ECHOS

Le soutien public aux énergies fossiles de 51 pays parmi les plus avancés de la planète est passé de 362,4 milliards de dollars à 697,2 milliards en un an, pointe une étude de l’OCDE. La flambée du prix de l’énergie, dont il a fallu amortir le choc, explique cet emballement.

Les mesures de soutien aux ménages pour faire face à la flambée du prix de l'énergie ont explosé l'an dernier, au sein des pays les plus avancés de la planète, constate lundi l'OCDE.
Les mesures de soutien aux ménages pour faire face à la flambée du prix de l’énergie ont explosé l’an dernier, au sein des pays les plus avancés de la planète, constate lundi l’OCDE. (Frederic J. BROWN/AFP)

Les pays les plus avancés de la planète ont « considérablement renforcé leur soutien à la production et à la consommation de charbon, de pétrole et de gaz naturel », signale l’Organisation de coopération et de développement économique (OCDE) dans une étude publiée lundi . Une évolution qui ne va pas dans le sens d’une réduction des gaz à effet de serre (GES) à l’origine du dérèglement climatique.

Ses experts et ceux de l’Agence internationale de l’énergie (AIE), impliqués dans ces travaux, l’imputent pour une large part à la volonté de protéger les ménages de la flambée des prix de l’énergie. Une intention louable mais qui percute de plein fouet les engagements pris par de nombreux pays de supprimer ces subventions. Notamment ceux annoncés l’automne dernier à la COP26 de Glasgow par une vingtaine d’entre eux, dont la France, les Etats-Unis, le Royaume-Uni ou encore les Pays-Bas, pour supprimer dès la fin de cette année les aides publiques accordées aux nouveaux projets charbonniers, pétroliers et gaziers sans techniques de capture de carbone.

Le grand écart entre les intentions et la réalité est impressionnant. Le soutien public global apporté aux combustibles fossiles dans les 51 pays étudiés – ceux de l’OCDE, du G20 et 33 autres grandes nations productrices et consommatrices – « a presque doublé, passant de 362,4 milliards de dollars en 2020 à 697,2 milliards en 2021 », détaille la note d’analyse. La faute à la hausse des prix de l’énergie associée à la reprise de l’économie mondiale, puis à leur flambée causée par « la guerre d’agression de la Russie contre l’Ukraine », indiquent ses auteurs.

Des niveaux encore jamais vus

Le conflit étant, semble-t-il, parti pour durer, « il est anticipé que les subventions à la consommation progresseront encore en 2022 », poursuivent-ils, en se montrant très critiques à l’égard des politiques menées par les gouvernements. Les hausses importantes des subventions aux combustibles fossiles qu’ils pratiquent « favorisent […] la surconsommation sans nécessairement aider les ménages à faible revenu », déplore notamment Mathias Cormann, le secrétaire général de l’OCDE.

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Dans le détail, les estimations établies par son organisation et qui couvrent environ 85 % des approvisionnements en énergie de la planète, chiffrent à 190 milliards de dollars le montant des allègements fiscaux liés à la production et à l’exploitation des fossiles pour les seules économies du G20. Une aide supérieure de 43 milliards à ce qu’elle était en 2020, c’est-à-dire un an plus tôt.

« Le soutien aux producteurs a atteint des niveaux que l’OCDE n’avait encore jamais constatés dans le cadre de ses activités de suivi, en se hissant à 64 milliards de dollars en 2021 – soit près de 50 % de plus en glissement annuel et 17 % de plus qu’en 2019 », ajoutent les experts du château de la Muette. Des subventions destinées à compenser les pertes occasionnées aux producteurs par diverses mesures de contrôles des prix intérieurs pendant la flambée des prix mondiaux de l’énergie à la fin de 2021.

Des aides insuffisamment ciblées

Le soutien aux consommateurs, lui, se chiffre à 115 milliards de dollars, contre 93 milliards en 2021, pour l’ensemble des pays membres de l’OCDE. A plus large échelle, celle de 42 économies retenue par l’AIE, ce soutien aux consommateurs est passé à 531 milliards de dollars l’an dernier. C’est plus de trois fois le niveau des aides qui leur a été prodigué en 2020.

Une politique de subventions à laquelle ni l’OCDE, ni l’AIE ne souscrivent, bien au contraire. Les deux institutions appellent régulièrement à la réorientation de cette manne au profit de solutions alternatives bas carbone et de l’amélioration de l’efficacité énergétique. Quant aux ménages, s’il faut continuer de les défendre, c’est d’abord avec des dispositifs plus ciblés, tournés vers les plus modestes, estime l’OCDE, plutôt que de « favoriser les ménages plus aisés qui consomment davantage de combustibles et d’énergie ».

Joël Cossardeaux

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