témoignage d’une agricultrice dans Ouest France

«Si je mets des mots sur les ressentis, la fille d’agriculteur du Pays du Léon (Finistère), l’élève des centres de formations agricoles des années 1980, l’ex salariée, l’ex-conjointe d’un agriculteur pendant 30 ans, dirait sa tristesse engendrant de la compassion. Mais la colère suit de très près.

Je compatis face à ce métier, exigeant des compétences multiples, une flexibilité d’adaptation face aux aléas climatiques, une nécessité d’organisation entre un métier indépendant et celle de la famille, souvent étroitement liée. Je compatis face aux conséquences morbides de l’évolution de leur métier, certains vont jusqu’à mettre fin à leur jour, d’autres victimes de maladies engendrées par les moyens de production.

Toutefois, c’est la colère qui domine : quand j’entends encore et toujours le discours de ceux des leurs qui sont censés les représenter, rester dans le déni. Ainsi la réflexion d’un agriculteur contre les normes environnementales : « Si on nous enlève la moitié des pesticides, c’est comme si on vous enlevait des touches de votre clavier d’ordinateur ».

Déni des dégâts engendrés par un modèle productiviste. Le « toujours plus », coûte que coûte quitte à abattre les « minables », à faire fi des paroles d’experts climatiques, des chercheurs de tous horizons… Et aussi nier, voire se moquer, des expériences réussies de ceux qui ont prôné des systèmes de production autres, bien plus avant-gardistes et respectueux de l’environnement que leur soi-disant « système moderne ».

J’ose espérer qu’il s’agisse vraiment de déni ! Et non pas d’une volonté consciente de tirer profit de leur situation de pouvoir. Pouvoir exercé par ceux dont ils sont les premières victimes : à savoir les firmes qui gravitent autour du monde paysan, celui des secteurs de l’industrie, et du tertiaire. Qui ont prôné des techniques, machines, et des financements très impactant : en saccageant la terre, le paysage, en stérilisant les sols, négligeant la biodiversité, et la santé de l’Homme… Alors que la dégradation de la nature nous rappelle à elle par des évènements des de plus en plus insoutenables pour les populations, que le mal manger draine sa cohorte de maladies, que le gaspillage alimentaire flirte avec la sous-alimentation, que la monoculture fait disparaître des lieux de biodiversité et de cultures vivrières, anéantissant leur peuple…

À qui continue de faire profiter ce système ainsi destructeur à tous les niveaux ?

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