COP30 : Curupira, gardien de l’Amazonie et mascotte controversée de la conférence à Belem (4)

Une femme prend une photo avec Curupira, légendaire gardien de la forêt et mascotte de la COP30 à Belem, le 13 novembre 2025.
Une femme prend une photo avec Curupira, légendaire gardien de la forêt et mascotte de la COP30 à Belem, le 13 novembre 2025.  MAURO PIMENTEL / AFP

La COP30 de Belem, au Brésil, est incarnée par Curupira, une créature mystique gardienne de la forêt dans les traditions des peuples amazoniens. Mais le choix de cette figure populaire, et spirituelle, comme mascotte pour les négociations est contesté par les organisations autochtones.

Crinière flamboyante et pieds de travers, difficile de passer à côté de Curupira, la mascotte de la COP30 qui parcourt les couloirs de la conférence et promeut, sur les affiches publicitaires comme à la télévision, les négociations en cours pour le climat.

Qui mieux que Curupira, mythique figure de la forêt dans les traditions des peuples amazoniens, pourrait incarner une COP aux portes de l’Amazonie ? « Curupira n’est pas une mascotte. C’est un gardien », dénonce cependant les organisations autochtones et les mouvements amazoniens, rassemblés pour le sommet des peuples, qui se tient depuis le 12 novembre à Belem en parallèle de la COP30.À lire aussiCOP30 au Brésil : une première semaine mitigée entre consultations, tensions et « bonne surprise »

Dans une communication publiée sur Instagram, l’organisation dénonce l’appropriation d’une figure qui « fait partie de la spiritualité des peuples autochtones et de leur vision du monde ». Quelques jours auparavant, plusieurs dizaines de manifestants indigènes ont forcé l’entrée du site de la COP30 pour porter leurs revendications.

« Curupira ne conclut pas d’accord avec les compagnies pétrolières »

« Ceux qui connaissent ses histoires le savent : il ne serait jamais à la porte de la COP30 pour accueillir les malfaiteurs » dénonce le sommet des peuples, en référence à la présence de nombreux participants liés, plus ou moins directement, à l’industrie des énergies fossiles. « Curupira ne conclut pas d’accord avec les compagnies pétrolières. Il ne pose pas pour des selfies avec le bétail et le soja qui détruisent l’Amazonie. Il ne s’associe pas à ceux qui déboisent, polluent les rivières, expulsent les communautés, tirent profit des incendies ou transforment la forêt en marchandise. »

À l’inverse, Curupira « punit ceux qui envahissent, détruisent et exploitent mère nature » affirme le sommetGrâce à ses pieds à l’envers traçant de fausses pistes, cette créature fantastique déroute en effet les hommes qui portent atteinte à son environnement : braconniers, orpailleurs…

Une légende populaire

Curupira est le premier personnage légendaire dont les colonisateurs portugais ont eu connaissance, au XVIe siècle, explique l’universitaire franco-brésilienne Maria Thedim dans la Revue du réseau d’études décoloniales. Le nom Curupira viendrait de curumim («petit garçon ») et pira («corps »). Et le petit homme à la crinière de feu n’est pas limité à la lisière brésilienne, rappelle l’universitaire Sandro Figueiredo Borges dans son mémoire sur les « légendes de l’Amazonie transfrontalière ». En Guyane, la légende raconte qu’un gnome, le Maskilili, doté également de pieds à l’envers perd les chasseurs et les enfants imprudents.À lire aussiCOP30 : à Belem, la marche mondiale pour le climat fait son grand retour

Avant d’être la mascotte de la COP, le Curupira a fait de nombreuses apparitions dans la culture populaire brésilienne : tubes de musique, séries télé… Les fans d’Harry Potter retrouvent aussi la créature dans une série d’articles publiés en 2014 par JK. Rowling.

L’auteure de la saga best-seller reprenait la plume pour raconter, sous forme d’articles de presse et de commentaires de match dans la Coupe du monde de Quidditch 2014. Les Curupiras sont ici les mascottes de l’équipe brésilienne. En fin de tournoi, quand les créatures brésiliennes entrent dans le stade avant le match Brésil-Bulgarie, la journaliste – Ginny Potter, épouse d’Harry – écrit que « les Curupiras brésiliens ont déjà causé beaucoup de dégâts depuis le début du tournoi, mais ils sont tout aussi populaires, surtout auprès des enfants ».

Protecteur des animaux sauvages et de la nature

Loin des bêtises dans le monde des sorciers, Curupira est aussi un symbole de lutte régulièrement invoqué. Dans l’État de Rio de Janeiro, il est ainsi devenu le symbole officiel de la lutte contre le trafic des animaux sauvages quand, à Sao Paulo, il est davantage celui de la protection de la nature, décrit Maria Thedim. En 2023, l’Université de l’État d’Amazonas développe même des boîtiers dotés d’intelligence artificielle nommés Curupira pour alerter de manière automatique sur la mise en marche d’outils susceptibles d’abattre les arbres de la forêt primaire.

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