Retour en arrière: analyse du journal LA CROIX: Climat : les scientifiques du Giec avaient-ils, il y a 35 ans, anticipé les vagues de chaleur ? Bravo au GIEC

Sacha DerrienPublié le 25 août 2025 à 6h48Lecture : 2 min

Une photographie prise dans le fjord Scoresby, dans l’est du Groenland, en août 2023.
Une photographie prise dans le fjord Scoresby, dans l’est du Groenland, en août 2023.  Olivier Morin / AFP

En 1990, le Giec publiait son premier rapport et prédisait notamment la température moyenne qu’il ferait en 2025. Si la méthodologie des experts a depuis évolué, rendant en partie caducs les résultats des modélisations de l’époque, les effets du dérèglement avaient, eux, été correctement anticipés.

C’était il y a trente-cinq ans. En 1990, le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec) publiait son premier rapport, fruit du travail de 2 500 scientifiques. Ce volume d’une centaine de pages comprenait des modélisations dessinant ce que pourrait être le climat en… 2025. Que disaient les chercheurs à l’époque ? Avaient-ils anticipé l’emballement des températures ? Alors qu’une partie de l’Europe a été en proie cet été à plusieurs vagues de chaleur, La Croix s’est replongée dans ce rapport.À lire aussiClimat : « En 2100, un été aussi chaud qu’en 2003 serait presque considéré comme un été frais »

Les scientifiques avaient modélisé différents scénarios. Dans le plus défavorable, ils estimaient entre 1,3 et 1,6 °C la hausse de la température en 2025 par rapport à l’ère préindustrielle. En 2024, cette augmentation s’est élevée à 1,26 °C, donc légèrement inférieur aux projections du Giec. « Depuis 1990, la hausse atteint en moyenne 0,2 °C par décennie alors que dans le rapport, il était question de 0,3 °C », précise Roland Séférian, chercheur à Météo France. Une différence qui s’explique, selon lui, par un changement d’approche. Les scientifiques prenaient en compte, de manière rudimentaire, l’effet des aérosols et des particules fines qui réduisent l’impact du rayonnement solaire de 10 à 15 % et donc limitent le réchauffement.

La montée des eaux sous-estimée

C’est aussi une question de méthodologie qui explique des estimations différentes en matière d’émission de CO2. À première vue, les experts du Giec avaient vu juste. La moyenne d’émission s’établit aujourd’hui à 4,7 tonnes de CO2 par habitant, selon l’organisation Carbon Global Project, soit exactement le niveau mentionné dans le rapport de 1990.

Mais il y a malgré tout un bémol. Dans sa méthode de calcul, le Carbon Global Project n’a pas évalué au même niveau que les auteurs du rapport du Giec, les émissions en 1980, l’année qui sert de base pour les projections. Correction faite, il apparaît que le Giec prédisait une hausse des émissions plus importante que celle observée actuellement.À lire aussiBiodiversité : face à la disparition des coraux, comment protéger les récifs ?

Quid, enfin, de la montée des eaux ? Les chercheurs l’avaient sous-estimée. « En 1990, nous avions modélisé une augmentation du niveau de la mer de l’ordre de 20 centimètres en 2030. Or, nous avons déjà franchi ce seuil », souligne Sylvie Joussaume, climatologue, directrice de recherche au Centre national de recherche scientifique (CNRS).

« Nos connaissances sur le changement climatique étaient moins robustes »

Au fond, ces différences, qu’il s’agisse de la hausse des températures, des émissions de CO2 ou du niveau des océans, témoignent de l’évolution de la connaissance scientifique. « Dans les années 1990, il y avait moins de facteurs, moins de données entrant en compte dans les modélisations. Et nos connaissances sur les mécanismes du changement climatique étaient moins robustes qu’aujourd’hui », explique Roland Séférian.

Ainsi, dans les trois premiers rapports, les experts considéraient qu’une partie du réchauffement n’était pas liée à l’activité humaine. Ils ont révisé depuis leur approche. L’ingénieur de Météo France y voit une note d’espoir. « Si nous arrêtons d’émettre, l’augmentation de la température cessera », insiste-t-il.

Car si les modélisations du Giec manquaient de précisions, les experts avaient parfaitement prédit les effets du dérèglement : sécheresse, incendies, pluies intenses… Ils avaient aussi mentionné les impacts sur la santé publique.

L’actualité leur donne raison. La vague de chaleur qui a frappé l’Espagne pendant seize jours en août, et qui aurait provoqué le décès de 1 149 personnes, a été « la plus intense depuis qu’il existe des relevés » dans le pays, c’est-à-dire 1950, a annoncé l’Agence d’État de météorologie, dimanche 24 août. Elle a dépassé celle de juillet 2022, avec des températures supérieures de 4,6 °C à celles d’une vague de chaleur normale, elle a dépassé le précédent record, qui datait de juillet 2022, avec + 4,5 °C.

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