Rififi sur les massifs coralliens en Polynésie


Cette fois la guerre est déclarée entre responsables des nurseries et des sites de restauration coralliens en Polynésie.

Nous savons désormais qu’un des effets du réchauffement est le blanchissement et la mort des coraux « pas seulement le réchauffement précise Sophie Carnuccini qui gère les dossiers IFRECOR au MOM. Les pollutions tellurique et humaine accroissent le désastre »

Sophie Carnuccini IFRECOR / MOM

Pour contrer cette dégradation, depuis quelques années sont nés les jardiniers du corail . Ils replantent des morceaux de corail, les font grandir en nurseries, les repositionnant ensuite sur des arbres en tubes de PVC . Même si les enfants raffolent de cette activité qui leur permet de se familiariser à ce trésor naturel menacé et de mieux identifier les différentes espèces, ils ne sont pas les « sauveurs du corail »

« Les spécialistes se multiplient ; ils utilisent des colles ou des plastiques incompatibles avec la bonne santé des récifs… Tout cela n’est  que de la gestion de replantation corrige Sophie Caruccini. Un récif est quelque chose de complexe qui nécessite beaucoup de connaissances scientifiques. Et le discours est perturbant, car on finit par croire que l’on peut sauver simplement le corail. Or reproduire du corail en nurserie n’a rien à voir avec restaurer un , ou sauver les récifs coralliens » , c’est comme si un planteur de pin dans les Landes prétendait reproduire la biodiversité d’une forêt.

Au CRIOBE à MOREA on se préoccupe des sites, des températures, des espèces et Biomim4Coral , institut de biomimétisme, repense les pépinières coralliennes en cultivant ses boutures sur des arbres en pandanus tressés par des artisans des Australes. «  on replante alors tout ce qui est cassé,  nous explique la députée Maina Sage Bien sûr tout ne reprend,  ou ne pousse pas,  car les coraux sont fragiles, mais globalement on recrée des arbres qui peuvent faire de beaux jardins sous marins. On a malgré tout acquis une certitude: le corail peut se restaurer. Si on lui en laisse le temps !  Il a une forte résilience, à condition que les vagues de chaleur ne se succèdent pas trop rapidement.

Laetitia Haubin , chercheuse au CNRS , travaille au CRIOBE à Morea. Elle a vu lors d’épisode de réchauffement  en 2018 et 2019 blanchir et mourir plus de 50% des coraux élevés à grand frais dans les pépinières.

 En partenariat avec l’Institut polynésien de biomimétisme (IPB), le Criobe a donc mis au point le projet Biomim4Coral. Laetitia tente d’entretenir des nurseries de plusieurs étages s’ombrageant mutuellement selon le principe des arbres d’une forêt tropicale et dont les replantations se font sur des cerceaux tissés en pandanus (1)

L’identification des expériences négatives devient nécessaire pour passer à une dimension globale de la résilience. La recherche des éco systèmes favorables est indispensable.

« Au delà de l’espèce, une nouvelle étape devrait permettre de définir les zones sources de larves, d’identifier celles où des parents plus résistants sont connectés, ou encore les zones refuges plus protégées ou plus profondes , précise Laetitia (2) » 

Des zones encore souvent inconnues des chercheurs spécialisés, car jamais inventoriées (on ne connaît bien que l’espace entre 0 et 30m de profondeur) mais pour lesquelles les données satellites  peuvent être utiles. Sur le continent européen dans la principauté de Monaco, grâce à la cryoconservation,  le travail sur les banques de souches se poursuit. Des progrès gigantesques ont été faits en génétique et nous découvrons des interactions mille fois plus complexes que celles imaginées : certaines espèces diminuent, d’autres prennent le dessus. On ne peut pas préjuger de ce que seront les connaissances dans 10/20/30 ans et qu’elles seront alors les technologies à notre disposition.

Dominique Martin Ferrari

(1) C’est à un collectionneur de poissons que l’on doit le concept d’arbre à coraux. L’Américain Ken Nedimyer a créé la Fondation de restauration du corail (CRF), en 2007 à Key Largo (Floride), en réponse au déclin généralisé des espèces de coraux sur le récif situé au large de la Floride, entre Miami et Key West.

(2) https://new.kahikai.org/science/acid-reefs/ ü Mise en place d’une exposition de portraits d’organismes récifaux avec l’association KahiKai ü avec l’artiste dessinateur de presse, Mykaïa, http://mykaia.fr. Une série de 3 dessins humoristes est en cours de préparation pour sensibiliser la société civile. ü Mise en place d’une enquête sur la perception de l’acidification de l’océan par la société civile afin d’évaluer quels moyens de communication pour « toucher » le grand public Contacts Dr Laetitia Hédouin, CR CNRS, CRIOBE Laetitia.hedouin@criobe.pf Dr Laetitia Hédouin, Chargée de recherches, CNRS, Centre de Recherches Insulaires et Observatoire de l’Environnement, CRIOBE

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