L’activité minière est elle en passe de changer en Guyane suite aux réformes

Helene Ferrarini, GUYAWEB

Les exploitants miniers obtiennent un accès facilité aux chantiers illégaux

Signée par Emmanuel Macron durant l’entre-deux-tours de l’élection présidentielle, une ordonnance réformant le droit minier permet désormais d’attribuer des sites exploités illégalement à des opérateurs légaux par une procédure administrative simplifiée à l’extrême. Les compagnies minières vont pouvoir accéder à l’or des chantiers clandestins en remplaçant les garimpeiros au nom de la lutte contre l’orpaillage illégal. Pourtant, un an après la commission d’enquête parlementaire sur le sujet, l’efficacité d’une telle mesure n’a toujours pas été prouvée.

Le nouvel article L. 621-4-1 du droit minier prévoit que des opérateurs légaux pourront travailler dans des zones exploitées illégalement sur un simple accord ou une sélection du préfet de Guyane, sans avoir « à présenter les demandes d’autorisation ou les déclarations auxquels ces travaux sont en principe soumis ». Cet accès facilité aux chantiers clandestins, faisant fi de toute la règlementation environnementale en vigueur, se fait au nom de la lutte contre l’orpaillage illégal. Dans le texte de loi, ces travaux sont « destinés à prévenir un danger grave et immédiat, présentant un caractère d’urgence, ou à y remédier ». En contrepartie, les exploitants bénéficieront de l’or qu’ils auront extrait, précise l’article de loi qui prévoit donc qu’une production aurifère aura lieu en sus des travaux de réhabilitation. 

Avec cette disposition, le gouvernement a lancé une petite bombe, passée jusqu’à présent inaperçue, en pleine période électorale. L’ordonnance a été signée le 13 avril, trois jours après le premier tour de l’élection présidentielle, par le président de la République Emmanuel Macron, le Premier ministre Jean Castex, les ministres de la Transition écologique Barbara Pompili, de l’Economie Bruno Le Maire et des Outre-mer Sébastien Lecornu, quelques semaines avant la mise en place du nouveau gouvernement. 

L’efficacité d’une telle mesure a été largement débattue l’an dernier, lors des débats parlementaires sur la loi Climat comportant une réforme minière et au sein de la commission d’enquête parlementaire sur la lutte contre l’orpaillage illégal. 8600 garimpeiros cherchent clandestinement de l’or dans l’intérieur de la Guyane, d’où ils extraient 10 à 12 tonnes chaque année, estime la commission d’enquête. L’orpaillage illégal cause la déforestation annuelle de 500 à 600 hectares. 13 tonnes de mercure sont déversées chaque année, polluant les cours d’eau et intoxiquant les populations riveraines. 

Lutte contre l’orpaillage illégal

Face à ce fléau, les exploitants miniers légaux se présentent comme un moyen de lutte efficace. Et pour défendre cette idée, ils peuvent compter sur le soutien de Lénaïck Adam, député guyanais La République en Marche, actuellement candidat à sa réélection. « L’essentiel pour moi (…) c’est de faciliter la vie des légaux » affirmait-il l’an dernier. Sa place à la tête de la commission d’enquête sur l’orpaillage illégal avait fait débat suite aux révélations de Guyawebconcernant la proximité du jeune député avec les activités d’orpaillage de son père, M. Abango Adam, condamné en première instance pour atteinte environnementale par occupation illégale du site minier « Délices » et relaxé en appel en octobre 2021 (Guyaweb du 04/01/2022). Lénaïck Adam avait multiplié les prises de parole pour faciliter l’installation d’opérateurs miniers (Guyaweb du 16/04/2021). 

Sur le coup, le lobbying exercé par le député LREM n’avait pas été suivi d’effet, ses amendements visant à instaurer des dérogations en faveur des sociétés minières en Guyane n’ayant pas été retenus. Mais un an après, son travail semble finalement avoir porté ses fruits. Contacté par Guyaweb, Lénaïck Adam n’a pas répondu. 

Pourtant, l’apport des opérateurs miniers dans la lutte contre l’orpaillage illégal n’a toujours pas été prouvé, et ce jusque dans les conclusions de la commission d’enquête présidée par Lénaïck Adam et ayant pour rapporteur Gabriel Serville, député de la première circonscription guyanaise jusqu’à son élection à la présidence de la CTG en juin 2021. Le rapport de la commission s’interroge ainsi sur le fait que « remplacer les orpailleurs légaux par des illégaux, et plus largement développer l’orpaillage légal » soit « une fausse bonne idée » pour lutter contre l’orpaillage illégal. Il souligne « les limites du remplacement des activités illégales par des activités légales ». Les auditions menées par les membres de la commission font état « du caractère non dissuasif de la présence d’activités d’orpaillage légal sur les garimpeiros », d’« une certaine porosité entre les activités légales et illégales », voire même d’une « proximité entre les deux ». 

Expérimentation décevante

L’implantation d’opérateurs légaux sur des sites exploités par des clandestins, via une « procédure accélérée », a déjà été expérimentée en Guyane entre 2013 et 2015. « Le bilan s’avère plus que mitigé », conclut la commission d’enquête parlementaire. Le passage du rapport à ce propos est édifiant. « Tous les orpailleurs illégaux n’ont pas quitté les sites », peut-on y lire. « La preuve de la possibilité d’exploiter légalement une zone de manière à éviter tout retour d’exploitants illégaux n’a pas été établie » avançait devant les parlementaires Antoine Masson, ingénieur général des mines au ministère de l’Economie, chargé par les ministres de la Transition écologique et de l’Economie d’une « mission sur le développement d’une filière aurifère responsable en Guyane ». Seuls dix des vingt sites d’orpaillage clandestin retenus dans l’expérimentation de 2013-2015 avaient été investis par des opérateurs miniers. « Le désintérêt », le « manque d’attractivité de certaines zones sélectionnées »« des gisements en or moins riches que prévus » expliqueraient ce peu d’engagement. Quant à l’efficacité de la réhabilitation de ces sites endommagés par l’exploitation illégale, seuls six sur dix avaient été effectivement « réhabilités pour cinq quitus accordés ». De manière générale, la réhabilitation des chantiers d’orpaillage légalement exploités pose question en Guyane, ainsi que l’aborde cette interview de l’opératrice Joziani Brandelero publiée lundi 23 mai sur Guyaweb.

Pour cette exploitante minière, le remplacement des garimpeiros par des opérateurs légaux est une évidence : « il faut le faire absolument sinon on n’a plus de place. Les clandestins vont prendre la Guyane en entier » affirme-t-elle à Guyaweb. Un autre opérateur minier que nous avons contacté s’inscrit en faux contre les conclusions du rapport de la commission d’enquête parlementaire. Il trouve « aberrant » de se demander si le remplacement des clandestins par des opérateurs légaux « est efficace ». « Naturellement, c’est efficace », assène-t-il sans apporter de preuve concrète hormis son témoignage oral qu’il souhaite anonyme. La Fédération des opérateurs miniers de Guyane (FEDOM-G), jointe via sa présidente Mme Ostorero, ne nous a pas répondu à ce jour.

L’idée selon laquelle le remplacement des garimpeiros par des entreprises minières est un moyen de lutte efficace contre l’orpaillage clandestin est partagée par certains décideurs publics. Devant les membres de la commission d’enquête, Thierry Queffelec, préfet de la Guyane, affirmait que « faute de pouvoir tenir le terrain, il faut au moins l’occuper en développant l’orpaillage légal amélioré ». Quant à Sébastien Lecornu, alors ministre des Outre-mer et qui vient d’être nommé aux Armées, il se déclarait en 2021 « favorable à installer des légaux à la place des illégaux ». 

Péril minier

Le rapport de la commission d’enquête publié en juillet 2021 a finalement retenu une proposition visant à « remplacer au cas par cas les sites illégaux par des exploitations légales dans le respect des normes environnementales ». 

La députée Bénédicte Taurine, membre de la commission d’enquête, a pris ses distances avec cette proposition dans une « contribution » jointe au rapport final. L’élue La France insoumise (LFI), qui avait appelé à la démission de Lénaïck Adam de la présidence de la commission suite à la publication de l’enquête de Guyaweb, rappelle « que l’expérience de transferts de sites illégaux sous gestion légale ayant eu lieu entre 2013 et 2015 ne s’est pas révélée satisfaisante ». 

Lorsque l’idée a refait surface dans le projet d’ordonnance mis en ligne en février 2022, l’association France Nature Environnement (FNE) a demandé la suppression de cette disposition. Dans des observations apportées au projet d’ordonnance avant son adoption par l’exécutif, FNE soulignait que « la cessation des risques de péril minier impose des mesures conservatoires immédiates, et non une poursuite d’exploitation hors évaluation environnementale ». Pour Guyane Nature Environnement (GNE) qui a également adressé des remarques lors de la consultation en ligne pour le projet d’ordonnance, « la caractérisation de l’urgence reste en question et celle-ci ne doit pas permettre qu’un opérateur puisse obtenir une autorisation à ce titre sans prise en compte de son impact environnemental ».

Le premier quinquennat d’Emmanuel Macron aura finalement permis de légiférer sur le droit minier, qui devait être réformé de longue date, en l’intégrant à la loi Climat, sans la moindre consultation des membres de la Convention citoyenne pour le climat dont ladite loi était censée reprendre les recommandations (voir Guyaweb du 10/12/2020). Une première partie de la réforme minière a été adoptée par le Parlement en août 2021 ; elle prévoit un durcissement des sanctions à l’égard de l’orpaillage clandestin (Guyaweb du 25/08/2021). La loi Climat habilitait également le gouvernement à légiférer par ordonnances – sans débattre au Parlement – sur un ensemble de points du droit minier. Le gouvernement était ainsi autorisé à prendre « toutes dispositions de nature à faciliter la réhabilitation des sites ayant été le siège d’activités illégales d’orpaillage » (article 81 de la loi Climat), une formulation qui ne laissait pas entendre que cela consisterait en un remplacement des garimpeiros par des opérateurs légaux. C’est cette disposition particulièrement polémique qui a finalement été retenue. 

L’article de loi dans son intégralité :« Art. L. 621-4-1. – Afin de lutter contre l’orpaillage illégal en Guyane, à l’intérieur de zones irrégulièrement exploitées et ouvertes à l’activité minière par le schéma départemental d’orientation minière, des travaux destinés à prévenir un danger grave et immédiat, présentant un caractère d’urgence, ou à y remédier, peuvent être entrepris soit par des opérateurs, sélectionnés par le représentant de l’État en contrepartie de la libre disposition des produits extraits, soit par le détenteur du titre minier, du permis ou de l’autorisation d’exploitation correspondant à la zone impactée par cette exploitation irrégulière, après accord du représentant de l’État.
« Dans ces deux cas, les travaux peuvent être entrepris sans que ces opérateurs ou ces titulaires aient à présenter les demandes d’autorisation ou les déclarations auxquels ces travaux sont en principe soumis.
SUITE, GUYAWEB, TOUJOURS:

LA RÉHABILITATION DES SITES MINIERS EN QUESTION
|  Par : Marion Briswalter

Interview de Joziani Brandelero, opératrice minière de 50 ans à la tête de quatre sociétés et adhérente de la Fédération des opérateurs miniers de Guyane (Fedomg), sur la question de la réhabilitation des sites miniers légaux. 
Alors que l’activité minière légale est porteuse de lourds impacts environnementaux, les lacunes en matière de réhabilitation demeurent. Pour améliorer la situation, un nouveau guide technique a été proposé à celles et ceux qui pratiquent l’exploitation alluvionnaire par l’Office français de la biodiversité (OFB), la Direction régionale de l’environnement et l’Office régional de l’eau. 
Comment procédez-vous à la réhabilitation des écosystèmes que vous détruisez ?
Avec une AEX [autorisation d’exploitation d’1 km2, ndlr] on détruit sur une largeur pour produire ; on fait un canal de dérivation. Après on remet la crique là où elle se trouvait au début et après on met le gravier, après le terreau et à la fin on met les bois coupés et on met les boutures en terre.
Des opérateurs se plaignent de l’absence d’encadrement et de dynamisme des autorités et services forestiers et environnementaux compétents pour les aider à se conformer aux obligations en matière de réhabilitation des sites miniers. Partagez-vous leur point de vue ?
Oui, on est trop isolés. On vient nous contrôler de temps en temps, mais personne ne vient nous donner de conseils. Et lors de la dernière visite [par les autorités, qui vaut validation ou non de la réhabilitation, ndlr], pourquoi ne nous appellent-ils pas avant de passer ? Car nous avons plein de doutes, plein de choses que l’on voudrait leur demander sur le terrain pour améliorer notre réhabilitation car nous, on voudrait évoluer.
Vous n’avez aujourd’hui aucun référentiel pour réhabiliter les sites ?
Non, on n’a pas de guide. Moi je sais faire parce que c’est mon boulot, que j’ai appris à le faire par moi-même. Il n’y a pas tous les collègues qui le font. Mais moi je ne suis pas loin de savoir le faire. On fait bien le travail comme on peut.
Face à la nécessité pour l’administration d’avoir un vrai manuel de référence technique en matière de réhabilitation et pour « atténuer les risques de pollution », un projet a été initié en 2018 par la Direction régionale de l’environnement et l’Office régional de l’eau notamment. C’est le programme “Rhysog” (Réhabilitation hydromorphologique des sites d’orpaillage guyanais). L’Office français de la biodiversité a co-écrit un nouveau guide pratique. Mais des opératrices et opérateurs se sont opposé·es à ce nouveau référentiel car ils et elles estiment, à l’image de l’opérateur Christian Pernaut que nous avons interviewé, que ce manuel n’est « pas adapté à la réalité du terrain » et que la méthodologie est discutable puisqu’il y a eu un changement en cours de route de bureau d’études. Cette histoire a mal fini puisqu’une partie de la filière s’est opposée à la restitution du programme comme cela était prévu au cours d’un séminaire qui devait se tenir à la Collectivité Territoriale de Guyane  (CTG) en octobre 2021. Au final, sous pression du lobby minier, la CTG a annulé le séminaire. Faites-vous partie des contempteurs de ce programme Rhysog ?
Oui, pour moi aussi il manque une adaptation au savoir-faire en Guyane. Là où on produit, les terrains ne sont pas tous les mêmes, il y en a où c’est sableux, d’autres non … L’inquiétude c’est sur les sols. Il y a des sols où les boutures poussent bien, d’autres non. Je préfère appliquer mes connaissances d’ici. En plus je n’ai pas été consultée. [Des opérateurs ont participé au programme et les sites qu’ils exploitent ont été pris comme sites témoins dans le cadre de l’élaboration du guide, ndlr].
Vous avez lu les préconisations de Rhysog ?
Pas tout.
Mais ce que vous avez lu ne vous convient pas ?
Non. La manière d’ensemble ne va pas. Pour chaque site il y a une manière de procéder. Ce n’est pas pareil partout. Alors qu’eux ils ont donné les mêmes conseils quel que soit le sol. Il y a des plantes qui poussent à certains endroits et pas à d’autres, en fonction du terreau, du sable … On ne peut pas faire la même chose partout, car les cours d’eau sont différents. Il faut venir voir sur place et s’adapter à chaque situation.
L’institution veut limiter les effets de l’extractivisme et de l’après-mine sur l’environnement, mais ce qui est intéressant c’est qu’aujourd’hui il y a un nouvel élément clé qui entre en jeu : c’est la perturbation du régime des pluies. Selon les premières projections (lire ici et ), le bouleversement climatique engendre en Guyane des périodes de pluies plus violentes, des saisons sèches plus longues. Depuis deux ans, à cause des pluies ininterrompues (consécutives à une perturbation des courants marins majeurs) vous ne pouvez pas réhabiliter les sites ?
C’est ça. Sur certains sites où ce n’est pas profond, on peut car ce n’est pas dangereux pour le personnel et les engins. Mais j’ai des sites où on ne peut pas venir ni avec les bull, ni avec les pelles parce que ça coule. Les stériles sont très mous. 
Comment faites-vous alors puisqu’il y a normalement une obligation de réhabiliter les sites avant de quitter les lieux ?
Maintenant l’ONF [Office national des forêts, ndlr] est avec nous. Même eux nous disent qu’il est hors de question de faire de la réhabilitation maintenant. Ils comprennent que nous avons besoin de temps par rapport à la saison. Donc lorsque nous faisons notre rapport trimestriel, on met dans nos observations qu’on n’a pas réhabilité.
Cette contrainte saisonnière va présenter un surcoût financier j’imagine ?
Ah oui ! On va mettre plus de temps à réhabiliter mais sans production. Je dirais qu’on va dépenser trois fois plus d’argent. Parce que le carburant coûte cher, on va avoir plus de distance à parcourir entre le site à réhabiliter et le site de production, car normalement on réhabilite au fur et à mesure de notre production. Et on risque aussi d’avoir des pertes dans les boutures parce que les sols sont inondés.
Combien vous coûte une réhabilitation en général ?
60 000 à 70 000 euros. 
Donc vous pensez qu’à cause des pluies incessantes la réhabilitation va vous coûter plus de 200 000 euros par site ?
Oui ou plus. J’ai des sites où ça va monter jusqu’à ça.
Combien avez-vous réalisé de chiffres d’affaires et de bénéfices en 2021 ?
Ça, je n’en parle pas.
Il y a aussi les prix des carburants qui ont explosé – et les économistes disent que cela va durer – en réponse à l’inflation engendrée par l’attaque de l’Ukraine par la Russie. Pensez-vous que les opérateurs et opératrices vont malgré ces prix élevés se conformer à utiliser les machines, très consommatrices en carburant, pour réhabiliter les sites : aplanir les sols, les remodeler, recreuser le lit d’un cours d’eau … ?
Je ne vais pas parler pour les autres mais pour moi. Moi je préfère faire les choses même si je fais moins de bénéfices mais au moins je pourrai comme ça avoir d’autres AEX [car théoriquement, un minier qui n’a pas réhabilité correctement peut être sanctionné par le préfet par une interdiction d’exercer pendant cinq ans, ndlr].
On arrive. La forêt est là. C’est notre obligation par rapport à nos enfants, notre santé, pour les animaux qui vivent. On détruit, c’est notre profession, mais on sait qu’on doit laisser le coin comme il est. C’est vrai que ça va durer un peu avant que les arbres poussent mais ils vont pousser quand même. 
J’ai des sites, ça fait pas longtemps, cinq-six ans, que j’ai planté et on ne voit pas la différence avec avant [Selon l’Office français de la biodiversité, il faut cependant « attendre une échelle décennale voire séculaire pour retrouver un milieu stabilisé et écologiquement comparable » d’avant mine. Dans la littérature scientifique, on lit aussi qu’une forêt qui repousse sur une ancienne mine et le sous-sol qui a ainsi été saigné seront très peu résilients, ndlr].
En 2020 une commission d’enquête sénatoriale pressait le Gouvernement d’introduire dans sa réforme du Code minier une « obligation » faite aux opérateurs « de constitution de garanties financières » pour la réhabilitation, au moment du dépôt de leur demande. Car certains (lire ici et ) se prévalent de ne plus avoir les moyens financiers en fin d’exploitation pour échapper à leurs obligations. Est-ce que cette obligation changerait quelque chose selon vous ?
D’un côté c’est bon. Mais de l’autre, pour ceux qui n’arrivent pas à faire une réserve, ça va quand même être dur. Mais je pense que ça ne changera pas grand chose car normalement si on laisse le site à l’abandon on n’a pas le droit d’avoir une nouvelle autorisation d’exploiter. Si je parle pour moi, ça ne va rien changer car je ne pars jamais sans réhabiliter. Je ne peux pas parler pour les opérateurs en général car on se connaît mais on ne connaît pas la manière de travailler de chacun. Je ne me mêle pas du travail des autres. 
Emmanuel Macron voudrait que la France devienne indépendante, ou moins dépendante, dans l’approvisionnement en terres rares (utilisées dans l’high-tech). Il parle de la nécessité de mieux recycler l’existant, mais leur extraction est aussi évoquée. Comme nous le révélions en 2020, Sudmines a engagé des recherches de terres rares, à travers l’obtention de trois permis d’exploration (vers la Montagne des singes, les chutes Voltaire et la basse Mana) de coltan, permis miniers d’ailleurs bientôt échus. Est-ce que la profession parle de se mettre à exploiter les sous-sols pour les terres rares ?
Non pas du tout.
On assiste depuis deux ans à une multiplication des procès pour atteinte environnementale présumée à l’encontre d’opérateurs et opératrices. Le projet Montagne d’or a essuyé une puissante contre-offensive populaire. Comment lisez-vous ces messages ?
Maintenant pour des détails qu’on ne comprend même pas, ça prend des proportions … Avant on pouvait discuter, s’arranger et maintenant il y a des procès qu’on ne comprend même pas pourquoi ça arrive jusque-là. Maintenant pour 15 mètres hors titre tu vas au tribunal. Et combien de terrains les clandestins prennent …
…Oui mais là, la question ce n’est pas le problème des clandestins.
Oui oui, on parle de nous. Mais moi je sais que bientôt j’aurai un procès aussi parce que j’ai utilisé une bassine de mon voisin qui était collée à mon AEX. Il l’avait libérée pour moi, pour faire la décantation de ma première baranque et quand j’ai reçu la première visite de l’ONF on m’a dit que son site avait échoué [était échu, ndlr]. Mais il n’était même pas au courant que ça avait échoué. Personne ne m’a écrit. Et j’ai découvert comme ça que mon dossier était devant le procureur.
Pensez-vous que la réforme du Code minier initiée par la loi Climat et résilience du 22 août 2021 et les ordonnances de 2022 associées, dont les effets sont attendus pour mi-2023, vont entraîner un changement profond dans votre façon de travailler puisque sous certains aspects la filière échappe au droit constitutionnel et au droit environnemental ?
Ça va compliquer les choses. Par exemple ils nous disent qu’on va pouvoir prendre « x » AEX [aujourd’hui une entreprise minière n’a pas le droit de posséder plus de trois AEX à la fois. Mais cette interdiction est contournée par certain.es qui multiplient les entreprises à leur nom, ndlr]. Mais on nous dit aussi qu’au-delà de 3 hectares il faudra faire une notice d’impact renforcée quel que soit le zonage du Sdom [Schéma départemental d’orientation minière, ndlr]. C’est très compliqué à faire ça. 
Votre activité engendre des perturbations dans un moment où la biodiversité, les sols, l’eau, les forêts, sont à préserver dans l’urgence. Comment faire ?
On m’a déjà refusé un titre parce qu’il y avait des poissons sous risque d’extinction. Mais quel poisson reste sur une crique sans descendre en aval ? C’est là que je ne comprends pas. À Papaïchton ils m’ont demandé de faire des inventaires, et pourquoi la plupart du terrain est déjà bouffée par les miniers illégaux ? C’est un secteur plein de clandos. Ils le font exprès pour qu’on lâche notre profession. Mon résumé c’est que les opérateurs miniers, on veut nous éliminer. Chaque année. A chaque réforme, c’est plus difficile pour nous. Ça nous complique la vie.

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