[ZERO WASTE FRANCE] Déchets : vers un moratoire sur tous les nouveaux projets d’incinération
Publié le ven 23/05/2025 – 12:00

Paris, le 22 mai 2025 – Présenté hier matin à la presse, un nouveau rapport de l’association Zero Waste France, dévoile une tendance inquiétante au développement de méga-incinérateurs en France, sous prétexte de production d’énergie. Décorrélés des ambitions de prévention des déchets, ces projets coûteux et polluants sont pourtant inefficaces sur le plan énergétique. Zero Waste France demande un moratoire sur tout nouvel incinérateur ou agrandissement.
Un moratoire nécessaire pour mettre fin aux dérives de l’incinération Dans son nouveau rapport “Les promesses fumeuses de l’incinération”, Zero Waste France met en évidence les nombreuses limites de l’incinération des ordures ménagères. En raison de la fin programmée de la mise en décharge – portée par l’objectif réglementaire de limiter à 10 % d’ici 2035 la part des déchets ménagers et assimilés (DMA) admise en installation de stockage – cette solution de traitement connaît ces dernières années un renouveau auprès des collectivités. En effet, les déchets ménagers et assimilés, loin de baisser comme le veut la loi AGEC, ont augmenté de 2,4%.“Les chiffres sont clairs : les politiques de prévention des déchets sont grippées”, analyse Pauline Debrabandere, responsable plaidoyer et campagnes de Zero Waste France. “Alors que la baisse de l’enfouissement était censée s’accompagner d’une diminution des déchets résiduels, elle s’est traduite par un simple transfert vers l’incinération”. En outre, les nouveaux projets affichent des capacités de traitement massives et prévoient d’incinérer de plus en plus de déchets d’entreprises. “On fait payer au contribuable la gestion des déchets du secteur privé”, commente Pauline Debrabandere. “C’est inacceptable ! Pour notre santé et la préservation de notre cadre de vie, il faut arrêter de financer les nouveaux projets d’incinérateurs et rediriger l’argent public vers toutes les initiatives qui permettent de réduire le gaspillage, comme le tri à la source des biodéchets, le réemploi et la réparation. Cela demande de la volonté politique et une planification au niveau national.” |
Les déchets, une source d’énergie inefficaceDans son rapport, Zero Waste France constate un vrai changement de paradigme dans le secteur des déchets. Depuis quelques années, la nécessité de produire une énergie “verte”, “décarbonée”, “locale” à partir des ordures ménagères est devenue l’une des principales justifications de l’agrandissement des “unités de valorisation énergétique” (UVE) et du développement des “combustibles solides de récupération” (CSR). “Derrière cette novlangue, il s’agit toujours de brûler des déchets”, alerte Bénédicte Kjaer Kahlat, responsable des affaires juridiques de l’association. “Nos ordures ménagères, en particulier les biodéchets, sont considérées comme une source d’énergie renouvelable : c’est aberrant ! Ces déchets résultent d’un gaspillage de matière et ont nécessité beaucoup de ressources pour leur production. De plus, comme ils sont principalement composés d’eau, leur combustion est inefficace sur le plan énergétique. Faire de la production d’énergie via l’incinération des déchets un enjeu clé pour notre mix énergétique n’est pas réaliste et favorise la surproduction de déchets au lieu d’œuvrer à leur réduction”. |
L’incinération, un pari coûteux et polluantEnfin, Zero Waste France rappelle dans son rapport que l’incinération est une méthode coûteuse de gestion des déchets, à la fois en raison des investissements qu’elle nécessite, mais aussi des dépenses consacrées à la gestion des conséquences des pollutions émises (dioxines, métaux lourds, particules fines, PFAS…). Plusieurs études de biosurveillance d’incinérateurs ont en effet confirmé la présence de substances toxiques, que ce soit à proximité directe des installations ou à plusieurs kilomètres. En France, pour le seul secteur de l’incinération, le coût sanitaire et environnemental de ces pollutions est estimé entre 2,5 et 3 milliards d’euros par an, selon une analyse réalisée par Zero Waste Toulouse sur la base de données communiquées par l’Agence européenne pour l’environnement. “Les effets de ces émissions de polluants sont nombreux et documentés, que ce soit sur l’environnement ou la santé humaine”, affirme Noémie Brouillard, chargée de projet de Zero Waste France. “On parle de troubles respiratoires, maladies cardio-vasculaires, perturbations hormonales, cancers… qui vont toucher de manière disproportionnée les populations plus vulnérables, comme les enfants, les personnes âgées ou souffrant de maladies chroniques, mais aussi les personnes issues des quartiers populaires, où se situent la plupart des incinérateurs. On est face à une véritable injustice environnementale”. |