Afrique/France 2021. Un sommet nouveau à Montpellier

Pris à Bordeaux, décalé à cause du covid, rebaptisé de France Afrique à Afrique France, sans invitation de chef d’état : une première depuis 1973 pour une 28° édition d’un sommet qui pose problème. Avec pour cette fois aucun chef d’état mais une adresse d’Emmanuel Macron à la jeunesse des 13 états  d’un immense continent que l’on a tendance à désigner comme s’il était UN : « l’Afrique »

En marge du sommet, le philosophe et historien Achille Mbembe  https://sommetafriquefrance.org/ a mené plus d’une soixantaine de rencontres avec des jeunes et des représentants des sociétés civiles dans 12 pays du continent. De ces rencontres, il a présenté au président français 13 propositions pour « refonder » la relation entre la France et le continent et  ce sont 11 personnes, six femmes et cinq hommes, qui ont été sélectionnées pour les présenter:

 https://www.rfi.fr/fr/france/20211008-en-direct-suivez-le-d%C3%A9bat-entre-emmanuel-macron-et-11-jeunes-africains ( lire surtout les interventions des « onze » et les réponses d’E Macron)

Les jeunes Africains se sont exprimés sur des sujets aussi variés que la démocratie dans leurs pays respectifs, mais aussi les relations entre leur pays et la France. Le président français a aussi été interpellé sur le sort des migrants en Méditerranée, sur la restitution des œuvres d’art pillées au Bénin, ou sur la réduction du nombre de visas pour les ressortissants du Maghreb. Défendant sa « sincérité » et niant tout « paternalisme », Emmanuel Macron s’est avoué « bousculé ». (France 24) Mais, au cours d’un dialogue parfois tendu, il a réitéré ses fondamentaux sur les sujets de contentieux soulevés par les jeunes : colonialisme, soutien à des dictatures, interventions militaires…

Pourquoi Montpellier ?

L’excellence des atouts scientifiques du territoire dans les domaines de la santé, du climat, de l’agronomie ou des technologies, en phase avec les domaines essentiels de la coopération Afrique – France, ainsi que la présence importante de diasporas africaines ont contribué au choix de la ville . Lundi et Mardi les principaux centres de recherches dont le CIRAD ont présenté les travaux qu’ils mènent sur l’agroforestrie, le foncier, la santé, l’énergie….Montpellier ambitionne de renforcer ses liens avec le continent. Les prochains sommets et appels en direction de la protection de la Méditerranée, hotspot mondial du CC et  point noir des migrations nous diront si l’essai a été réussi.

De cette  semaine consacrée à l’Afrique il ne faut pas voir le seul sommet de vendredi même si politiquement il donne le sens de ce rendez vous. Nous retiendrons plutôt l’incroyable créativité musicale, artistique ou littéraire qui s’est déployée au » village « dressé  autour du Pavillon Populaire sur l’Esplanade, à la maison du Tiers Monde boulevard Louis Blanc , au MOCO où l’Hôtel des collections invitait l’une des plus importantes collections du continent, la Fondation Zinsou, du Bénin.. Cosmogonies y a présenté près de 110 œuvres et le chef de l’État a annoncé que la France redonnerait fin octobre au Bénin 26 œuvres d’art provenant du « Trésor de Béhanzin », pillé au palais d’Abomey en 1892 pendant les guerres coloniales…. Sans oublier le FISE qui a connu un énorme succès et révèle une modernité un peu méconnue des militants .

Les associations militantes, réunies par Survie ont tenu un contre sommet. Salle pleine malgré la maitrise parfaite de l’événement par l’Elysée  qui avait voulu que ce sommet soit une « rupture »

Dominique Martin Ferrari

communication@survie.orgPour Pauline Tétillon, co-présidente de Survie, « ce sommet atteint pleinement les objectifs que l’Elysée lui avaient fixés : la relégitimation de la politique africaine de la France. Les autorités françaises s’appuient pour cela sur quelques jeunes Africain.e.s qu’elles s’arrogent le droit de qualifier de « pépites », comme si les autres n’étaient que de vulgaires cailloux. Quant aux deux militants sans-papiers arrêtés à Montpellier et enfermés en Centre de rétention administrative alors qu’ils venaient depuis Paris faire entendre leur voix, ils ne seraient que des grains de sable pris dans cette machine à broyer ? »

La même semaine, la publication de l’ouvrage collectif L’Empire qui ne veut pas mourir. Une histoire de la Françafrique (Le Seuil) [6], auquel des membres de Survie ont largement contribué, permet de resituer cette prétendue « rupture » dans l’histoire longue des relations franco-africaines : des décennies d’adaptation au contexte, forcément changeant selon les époques, pour maintenir une relation de domination au profit d’élites françaises et africaines. Après les précédentes annonces de « rupture » (avec Nicolas Sarkozy, puis François Hollande), celle de ces jours-ci innove peut-être dans la forme, mais l’écran de fumée aura tôt fait de se dissiper.

LES ONZE JEUNES AFRICAINS SELECTIONNES:

– Eldaa Koama, entrepreneuse burkinabè engagée dans le numérique et le social – Lova Rinel, présidente du Conseil représentatif des associations noires (Cran) – Adam Dicko, activiste malienne – Adelle Onyango, créatrice de podcast– Sandrine Naguertiga, entrepreneuse et blogueuse – Amina Zakhnouf, cofondatrice marocaine d’un incubateur de politiques publiques – Aliou Bah, qui préside un petit parti politique guinéen – Ateki Seta Caxton, un camerounais qui milite pour la participation citoyenne des jeunes – Arthur Banga, universitaire et chercheur ivoirien – Sinzo Aanza, écrivain – Cheikh Fall, blogueur et cyberactiviste sénégalais.

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